Présentation de ce site

Je n’ai pas reçu d’éducation religieuse. J’ai suivi ensuite un chemin semblable à une partie des jeunes de ma génération. Comme eux, je me suis passionné pour l’hindouisme. La plupart sont restés sympathisants ou se sont convertis, au bouddhisme ou à l’hindouisme. Au contraire, vers la trentaine, je me suis converti au christianisme. Mais pas au christianisme des églises, une recherche indépendante m’a permis d’aboutir à une compréhension du christianisme qui doit assez peu de chose à ce qu’elles enseignent.

Bien sûr, je ne suis pas le premier à réinterpréter le christianisme. Les spirites chrétiens, ou Rudolf Steiner, l’ont fait bien avant moi. D’ailleurs, ma position rejoint tout à fait celle du christianisme spirite, comme celle d’Alan Kardec ou de Chico Xavier. Toutefois, ma démarche est plus philosophique que la leur.

Je me propose de montrer que parmi les douzaines ou les milliers de doctrines que les hommes ont imaginées, le christianisme tient une place à part et que non seulement il reste tout à fait crédible, mais aussi qu’il présente une grandeur inégalée. Et qu’il est parfaitement possible d’être chrétien aujourd’hui sans faire aucune entorse à la raison. Peut-être parce que ce n’est pas une doctrine que les hommes ont imaginée. Celles qu’ils ont imaginées, au moins en partie, constituent le christianisme des églises, alors que le spiritisme chrétien n’est pas issu de l’imagination humaine.

Mon adhésion au christianisme ne doit rien à la foi ; je ne sais pas très bien ce que cela veut dire et je n’ai rien reçu de tel en héritage. L’expérience spirituelle, la réflexion et l’inspiration que m’ont procurée des textes très divers m’ont conduit au christianisme.

Je n’ai jamais non plus approuvé l’anti-intellectualisme forcené qui est la norme chez l’immense majorité de ceux qui entreprennent une démarche spirituelle, particulièrement chez les orientalisants. J’ai toujours considéré que la raison devait avoir sa place dans une telle démarche. C’est sans doute ce qui fait j’ai quelque chose à dire aujourd’hui.

Il me faut être très clair dans ce que j’entends par christianisme. Pour la plupart d’entre nous ce mot invoque un ensemble de religions. Mais la terminaison en “ isme ” signifie doctrine, vision du monde, philosophie. Une religion peut être chrétienne, elle n’est pas le christianisme. L’ensemble des religions chrétiennes ne sont pas non plus le christianisme. Une religion contient toutes sortes de choses parfaitement accessoires au christianisme proprement dit.

Une religion n’est pas seulement un ensemble de rituels et de croyances, c’est d’abord une doctrine, une philosophie, une vision du monde. Et c’est cela qu’elles peuvent avoir d’intéressant ; le reste est du folklore. Mais les esprits paresseux et superficiels, et ce n’est pas cela qui manque, ne voient que le folklore, l’essentiel restant ignoré et incompris. Demandez à quelqu’un quelle est la vision du monde correspondant au christianisme ou au bouddhisme ; vous êtes à peu près sûr d’obtenir une réponse ridicule, même s’il s’agit de ce que l’on appelle un intellectuel.

Le christianisme, c’est ce qui se trouve, au mieux, au cœur de ces religions chrétiennes. Le christianisme c’est d’abord ce qui ressort de l’enseignement de Jésus-Christ. C’est-à-dire ce que l’on peut raisonnablement déduire des évangiles et non la façon dont le christianisme s’est constitué historiquement.

Ainsi, quand je parlerai des doctrines religieuses, catholiques, orthodoxes ou protestantes, j’emploierai l’expression “ christianisme ecclésial ”. Et par “ christianisme ” j’entendrais une philosophie, une vision du monde et surtout le cœur même de cette philosophie.

Jean-Claude Guillebaud est revenu au catholicisme après l’avoir abandonné, il dit : « Ce qui m’attire vers lui, ce n’est pas une émotivité vague, c’est la conscience d’une fondamentale pertinence.[1] » Mais Guillebaud ne nous dit pas en quoi consiste cette pertinence fondamentale. C’est dommage, on aurait envie d’en savoir plus. Je me propose de tenter d’expliciter en quoi elle consiste et pourquoi il serait pertinent.

Ceci va complètement à l’encontre de la pensée dominante d’aujourd’hui. Le christianisme a perdu toute crédibilité et il ne reste plus beaucoup de monde pour penser qu’il possèderait une fondamentale pertinence.

Chez ceux que le christianisme ne laisse pas indifférents nous pouvons généralement observer deux attitudes opposées : un profond attachement ou un rejet viscéral. Les deux, d’ailleurs, peuvent se comprendre beaucoup mieux que l’indifférence.

S’il reste cependant encore tant de chrétiens aujourd’hui, c’est sans doute, au moins en partie, à cause de leur attachement et du sentiment qu’il y a là quelque chose de profond, de sérieux et de fondamentalement pertinent. Et pour ce quelque chose, beaucoup sont prêts à avaler bien des couleuvres. On dirait que l’attachement émotionnel, affectif et l’intérêt qu’ils éprouvent pour le christianisme constitue pour eux une excuse ou une raison pour adopter des idées fumeuses, gratuites et absolument invraisemblables.

Mais qui est le plus stupide dans l’affaire : celui qui ne comprend rien à cette fondamentale pertinence ou celui qui avalent quantité de couleuvres ?

Et il faudrait au moins que ceux qui adoptent une de ces deux attitudes comprennent les raisons de l’autre. Les chrétiens se plaignent, à juste titre, du rejet dont le christianisme est l’objet, et ceux qui le rejettent ont pour cela, peut-être, quelques raisons.

Je comprends très bien l’attachement que les chrétiens éprouvent envers les églises. Mais j’ai étudié et pratiqué des démarches rationnelles et je comprends aussi très bien le rejet et le dégoût devant les discours scabreux que celles-ci peuvent tenir.

Le christianisme ecclésial a mis en avant la foi. Cette mise en avant de la foi sert surtout à éponger l’absurdité de la doctrine ; et elle en a tellement épongé qu’elle est inutilisable. Tertullien disait : « Je crois parce que c’est absurde. » Mais si l’on refuse de croire en l’absurde, est-il encore possible d’être chrétien ? Il me semble. Je pense qu’il est possible d’élaborer une doctrine chrétienne cohérente et intelligible. Et qu’il n’est pas nécessaire de tomber de Charybde en Scylla. Rien ne nous empêche de comprendre cette pertinence fondamentale sans avaler pour autant les couleuvres.

Les seules critiques recevables que l’on puisse faire à l’encontre d’une doctrine portent sur ce que j’appellerai la congruence. Je veux dire par là une double cohérence. D’une part, la cohérence interne (la logique), d’autre part la cohérence avec la réalité observable. C’est cela qui détermine la pertinence, au moins en partie.

Je me propose de montrer que le christianisme peut être tout à fait congruent, et même certainement plus cohérent que les salmigondis que nous débitent les philosophes encensés par nos médias.

Il ne s’agit pas de savoir si le christianisme est vrai, mais s’il est crédible. Peut-il présenter une vision du monde qui soit simplement digne d’examen ?

Je ne m’intéresserai ici au christianisme ecclésial que pour montrer son caractère dépassé. Ce site présentera donc deux aspects : la critique du christianisme ecclésial et la démonstration que le christianisme peut présenter une forme tout à fait compréhensible et acceptable pour un homme d’aujourd’hui. La critique du christianisme des églises sera limitée à un seul article L’Église et la vie dans l’Univers et à un seul concept : l’idée que le Christ serait le fils unique de Dieu. Cet aspect est fondamental, même si on pourrait critiquer bien d’autres aspects. En rejetant cette idée, le christianisme reste relativement inchangé sur le plan existentiel. Toutefois, cette forme de christianisme n’est pas compatible avec les modes qui se sont développés historiquement.

Le christianisme a profondément modelé la pensée occidentale. On pourrait paraphraser Chesterton en disant : “ L’occident aujourd’hui ce sont des idées chrétiennes devenues folles ”. Bien que, pour nombre d’entre nous, c’est le christianisme qui serait fou et l’occident aurait enfin retrouvé la raison en abandonnant celui-ci.

Le christianisme était le sang qui coulait dans les veines de l’Occident. Il était pollué, vicié, incompris, certes. Mais il nous faut savoir ce que nous devons oublier du christianisme et ce que nous pouvons en retenir. Il est si souillé que l’on peut se demander s’il faut le purifier ou le jeter. La plupart d’entre nous ont choisi de le jeter, trop rapidement à mon sens.

En fait, le christianisme est méprisé et vilipendé bien que le personnage du Christ bénéficie encore d’un grand prestige. Si le christianisme ecclésial est obsolète, s’ensuit-il que l’enseignement du Christ doive être abandonné ? Et en quoi consiste cet enseignement ?

Il règne dans le monde d’aujourd’hui un immense brassage d’idées, il a abouti à ce que Jean-François Lyotard a appelé la fin des grands récits ; ou autrement dit “ Tout font le camp ”.

S’il n’est plus envisageable d’adhérer à l’un quelconque des grands récits, est-il encore possible d’élaborer un petit récit, sobre et modéré ? Est-on réellement et définitivement coincé dans le scepticisme ou le relativisme ou peut-on encore élaborer une vision du monde ?

Un récit sobre ne répond qu’à un petit nombre de questions. Mais il n’est pas pour autant insignifiant car ces questions sont fondamentales. Mais quelles sont ces questions fondamentales ? Je réponds à cela dans mon texte Quelle est la question fondamentale de la philosophie ? C’est par celle-ci qu’il est logiquement préférable de commencer. L’ordre des questions est très important. Établir un ordre logique des questions nous permettrait, en partie, de sortir de la confusion qui domine notre époque.

Les notions fondamentales du christianisme

Mais à quoi ressemblerait un christianisme sobre ? Qu’est-ce qui caractérise cette forme de rapport au monde et à la vie qui constitue le christianisme ? Je parle uniquement des idées fondamentales qui le constituent et de leur pertinence. Quelles sont ces idées ? Il y a trois problèmes ici :

* Quelles sont-elles ?

* En quoi et pourquoi sont-elles fondamentales ?

* En quoi et pourquoi sont-elles pertinentes ?

Répondons d’abord au premier item. Je tente de répondre aux deux autres dans ce site. Voici donc sept idées que je considère comme fondamentales et caractéristiques du christianisme :

1) L’existence de Dieu. Il y aurait une intention à l’origine de l’Univers.

2) C’est un  Dieu d’Amour.

3) La primauté absolue de l’Amour.

4) L’existence d’âmes individuelles.

5) L’affirmation de notre libre-arbitre.

6) L’idée que le combat entre le Bien et le Mal est une dimension essentielle de la vie. Ce combat se déroule aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de chacun d’entre nous. Le Bien et le Mal sont le résultat d’une libre adhésion, le produit de la volonté.

7) L’idée que l’Amour est source de joie et de souffrance et qu’il n’a pas moins de sens et de valeur quand il signifie joie que quand il signifie souffrance.

Restaurer la grandeur et l’intelligibilité du christianisme.

Je me propose donc de restaurer l’intelligibilité et la crédibilité du christianisme. Mais je projette une autre chose encore et peut-être plus importante : je vais tenter de montrer la grandeur du christianisme. Celle-ci réside dans la primauté absolue de l’Amour. J’explique ce que j’entends par là dans l’article Qu’est-ce qui caractérise le christianisme ? C’est donc à mes yeux l’article essentiel de ce site. Il consiste à établir la hiérarchie des valeurs caractéristique du christianisme.

En ce qui concerne l’intelligibilité, cela ne peut se faire que contre les églises. Pour la grandeur, cela ne peut se faire que contre la plupart des chrétiens. Mais sur ce dernier point, je ne m’oppose nullement aux églises. Cette grandeur n’a pas forcément été comprise, ni vécue, par les adeptes des religions, loin s’en faut. Mais on peut dire qu’elle l’a été à la mesure de la grandeur (ou de la petitesse) des âmes humaines et de leurs possibilités ; on ne peut pas en demander plus.

La clé, pour restaurer l’intelligibilité, consiste à introduire les notions de réincarnation et d’évolution. L’évolution va d’ailleurs de paire avec l’idée de réincarnation, au moins sous certaines conditions. Les idées de réincarnation et d’évolution permettent d’articuler de façon intelligible et cohérente toutes les notions fondamentales du christianisme.

La réincarnation n’est certainement pas une idée en l’air. Une “ croyance ”, comme on dit, quand on veut discréditer une idée sans prendre la peine de la discuter. Elle peut recevoir une validation forte, à défaut de preuve qui reste encore à établir. Celle-ci, d’ailleurs, aurait peut-être déjà été établie depuis longtemps si on ne consacrait pas l’essentiel de notre temps et de nos moyens à des idées et des projets insignifiants. J’en parle ici.

Le problème de la liberté ne peut se résoudre que grâce à la réincarnation. Je montre ceci dans l’article La question du sujet.

Un des problèmes majeurs auquel le christianisme ecclésial n’a jamais répondu est celui de la théodicée. Ne vous effrayez pas du mot, vous en connaissez au moins l’idée. C’est le problème de la justification de Dieu. Comment Dieu peut-il être Amour, tout puissant, et que nous vivions dans le monde dans lequel on vit ? La réincarnation permet d’y répondre de façon assez satisfaisante. Surtout si l’on ajoute l’idée que nous choisissons nos réincarnations en fonction d’une perspective évolutionniste et que les épreuves et les difficultés de la vie sont nécessaires à cette évolution. J’en parle dans le texte Le problème de la souffrance.

Il faut ajouter qu’aujourd’hui nous savons que notre vie n’est qu’une seconde dans l’histoire de l’Univers, ce qui relativise sérieusement nos problèmes.

L’enjeu

L’enjeu ici est formidable. Je dirais même qu’il n’y a pas d’enjeu plus important que celui-là. Il nous faut en effet savoir si la vie a un sens ou si, comme le dit Macbeth : « La vie n’est qu’une [...] histoire racontée par un idiot, pleine de bruits et de fureur, et qui ne signifie rien. [2] » Ou bien encore : « Einstein pensait que la question la plus grave qu’on puisse se poser sur la vie est de savoir si l’univers manifeste de la bienveillance ou de l’indifférence à notre égard. [3] »

Avons-nous une place dans l’Univers ou ne sommes-nous qu’un accident ? Si nous avons une place laquelle ? La vie serait-elle une triste histoire ? Y a-t-il des questions plus importantes que celle-ci ? Ne devrions-nous pas l’examiner soigneusement toute affaire cessante ?

À cette question, chacun y apporte une réponse, mais qui la pose vraiment ? Qui remet en question la réponse qu’il apporte ? Le manque de sérieux avec lequel cette question est investiguée témoigne de notre superficialité et de notre frivolité.

Selon moi, accepter de vivre, dire oui à la vie, ne peut se faire qu’à l’intérieur d’une philosophie qui veut que la vie ait un sens. Le christianisme est peut-être la seule philosophie pour laquelle la vie ait un sens. Je traite cette question dans l’article Entre le christianisme et le nihilisme il n’y a rien.

Devant le spectacle que nous offre le monde nous pouvons légitimement nous demander : mais qu’est-ce que c’est que ce cirque ? Et donner raison au personnage qu’imaginait Shakespeare.

Mais il existe aussi un point de vue selon lequel tout est peut-être très bien ainsi. La réincarnation, l’évolution, ajouté à l’idée que nous choisissons nos vies avant nos incarnations dans un but évolutif sont les clés qui permettent de comprendre ce point de vue. C’est ce qu’enseignait Platon, mais nous l’avons escamoté. Les clés de la compréhension du christianisme se trouvaient dans Platon et non chez Aristote.

Et si nous sommes profondément sérieux par rapport à ces questions, nous voulons une réponse en vérité. Quand on est profondément sérieux, on ne peut qu’accepter des réponses sérieuses à ces questions. Cela veut dire des réponses sérieusement fondées. Autrement dit, nous ne pouvons pas faire comme la plupart d’entre nous, adopter les idées qui nous conviennent. Cela signifie aussi que nous ne pouvons, en aucune manière, abandonner la rigueur.

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J’ai choisit de nommer ce site en .org, alors que j’étais seul à le faire, ceci parce que j’espérais rencontrer des personnes qui voudraient bien y participer. Mais, dix ans après je suis toujours seul et le compteur de visites ne s’affole pas. Je continuerai donc à travailler seul en espérant qu’un jour on prendra plus un peu plus mon travail au sérieux.

Le monde ne va sans doute pas tarder à s’enfoncer dans l’époque la plus sombre de son histoire. J’espère que ce site sera une lumière à quelques-uns, au moins pendant cette période. Et j’espère aussi qu’il participera à un renouveau du christianisme.

Christian Camus — 10/09/2019

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[1] Jean-Claude Guillebaud Comment je suis redevenu chrétien, éditions Albin Michel, p. 23

[2] Macbeth V, 5

[3] J’ai trouvé cette phrase chez Matthew Fox Le Christ cosmique, traduction Jean-Pierre Denis, éditions Albin Michel, Paris 1995, p. 17
J’ai remplacé “ hostilité ” par “ indifférence ”. En effet, on ne voit pas pourquoi l’Univers nous serait hostile, mais par contre il peut fort bien être indifférent. Je pense qui si Einstein a dit cela, il n’a probablement pas dit “ hostilité ” et qu’il s’agit plutôt d’une erreur de traduction. Toutefois, je doute de l’authenticité de cette citation. Je n’ai pas pu la retrouver à l’aide de Google, ce qui m’a autorisé à prendre quelque liberté avec elle. Et ceci n’est pas un travail d’histoire de la philosophie, mais de philosophie.